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Laurent Laporte (Braincube) : « Nous allons assister à une vague de réindustrialisation plutôt qu’à des relocalisations »

Laurent Laporte
© Laurent Laporte - Braincube
À l’heure où l’on parle de relocalisation industrielle, Laurent Laporte, fondateur de Braincube, a une autre vision des choses. Pour lui, nous allons plutôt assister à une vague de réindustrialisation, portée par de nouveaux acteurs et une production beaucoup plus localisée.

Depuis les années 80, la France a dévalorisé l’industrie. Dévalorisation des métiers, des outils… au profit des services, au détriment de la compétitivité. Cela s’explique par une transformation en termes de gouvernance des entreprises : de sociétés familiales, nous sommes passés à une génération de dirigeants-financiers. Le résultat direct ? Des plans financiers plus agressifs et des délocalisations dans des pays bon marché. Le résultat indirect ? Moins d’investissements dans les usines françaises, qui ont été surtaxées et qui ont moins progressé. Cette dynamique les a mis en retard, voire en danger.

Aujourd’hui, on se rend bien compte des limites de la situation. En Allemagne, où subsiste une culture industrielle beaucoup plus forte, les machines se perfectionnent. En Chine, on zieute sur les fleurons européens pour étendre son influence. Et en France ? On promet des relocalisations, soutenues par le plan France Relance.

Personnellement, je n’y crois pas du tout.

Réindustrialiser plutôt que relocaliser

Dans la mesure où les sociétés sont pilotées par des financiers, il n’est pas possible de fermer des usines ouvertes en Thaïlande, en Chine ou en Malaisie. Il faut amortir les actifs ! Et les beaux yeux du gouvernement ne suffiront pas à changer cela. Je pense que nous allons plutôt assister à une vague de réindustrialisation que de relocalisation, portée par des projets de nouvelle génération. Nous assisterons à l’émergence d’usines très automatisées, très flexibles, et implantées dans des territoires permettant la collaboration et la cohérence entre les différents acteurs.

Il y a deux types de start-up industrielles : celles qui vont créer des technologies, et celles qui vont créer des offres. Dans les deux cas, elles ont besoin de vivre dans un écosystème complet. Créer des offres ou des équipements demande des usines de production, et des solutions de stockage ou d’optimisation.

Par ailleurs, la réindustrialisation permet de créer une dynamique de transformation des usines existantes pour les mettre à niveau.

Vers une production géolocalisée

Ces nouveaux acteurs – qu’ils appartiennent au secteur de la biotech, de la foodtech, ou même de l’industrie textile – proposent des innovations que l’on peut produire localement. Nous pourrions imaginer un soutien du gouvernement pour une industrie made in France, mais aussi un intérêt de la part des acteurs traditionnels. Valeo, Safran ou Airbus pourraient tout à fait se mettre à « la production géolocalisée » : les usines fabriqueront en France pour les clients français, en Chine pour les clients chinois… Et la dynamique sera guidée par le coût des transports. Car c’est une réalité : il faut taxer le transport, qui pollue beaucoup trop aujourd’hui.

Cela pourrait donner lieu à l’émergence de petites usines, partout sur le territoire, portées par des acteurs traditionnels ou des start-up, qui généreraient des emplois par ruissellement.

Le retour des produits du quotidien

Au-delà d’une production liée à des secteurs stratégiques – pharmacie, électronique – la tendance pourrait être soutenue par la production des produits du quotidien. Plusieurs usines ont déjà vocation à fabriquer local pour le tissu local. C’est un marché à capturer : on ne s’habillera plus de la même manière à Paris ou en Ardèche. Cela pourrait permettre de faire émerger un savoir-faire haut de gamme, qui, en plus de fidéliser les clients, fidéliseraient la main d’œuvre.

Ainsi, l’industrie redeviendrait intéressante. Pour les consommateurs, et pour les gens qui vivent dans les bassins alimentés par les usines.  

Biographie

Laurent Laporte est ingénieur, diplômée des Arts et Métiers. Il fait carrière pendant 10 ans dans la production chez Safran puis Johnson Controls et Valeo, en France, en Italie et aux États-Unis, dans des postes de support process, responsable de production, directeur d’usine et enfin directeur des opérations. Puis, il passe 3 ans dans le conseil stratégique pour l’efficacité industrielle. Il fonde Braincube en 2007, avec pour ambition de devenir le leader mondial des solutions digitales qui permettent aux équipes de production de rapidement améliorer leur performance et d’optimiser leur fabrication grâce aux prédictions et aux recommandations issues de leurs données.

 

Mélanie Roosen & Géraldine Russell

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